L’AVIS TOXIQUE DE LA COUR CONSTITUTIONNELLE SUR LE PROJET DE NOUVELLE CONSTITUTION OU LES CHEMINS CONTRARIES DU DROIT EN GUINEE

DR ANDRE CAMARA
DR ANDRE CAMARA

Déclaration liminaire

Le problème guinéen relève d’un désordre institutionnel et normatif chronique. C’est pourquoi le débat actuel ne doit pas s’articuler uniquement autour du référendum pour la nouvelle Constitution et les prochaines législatives. Mais vue les circonstances, ces sujets semblent être le premier centre d’intérêt des différents acteurs.

Ainsi, nous aimerions d’entrée, préciser que nous sommes de ceux qui pensent que le changement n’est pas tabou en droit constitutionnel. Il ne doit être ni craint, ni diabolisé à partir du moment où il est initié dans les règles conformément aux principes légaux et démocratiques.

Malheureusement, ni le pouvoir établi, ni les institutions constitutionnelles et au premier chef la Cour constitutionnelle et l’Assemblée nationale ne semblent se situer dans cette logique. Le droit est une forme qui ne les commande pas.

I – LES DONNÉES DE LA SITUATION

Pendant que l’émotion suscitée par cet épisode tragique de la prorogation du mandat des députés par voie décrétale ne s’est pas encore estompée, aujourd’hui c’est l’onction de régularité qu’elle donne pour l’organisation d’un référendum pour un changement de Constitution qui scandalise les juristes, les politologues et polarise l’attention très circonspecte de l’opinion.

Nous sommes en présence d’une situation cornélienne dans laquelle la nation guinéenne s’est retrouvée sous l’empire de la Constitution de 2010 sans référendum, mais le problème est qu’elle ne peut en sortir sans un référendum.  Le hic c’est que le référendum abrogatif visant le changement de Constitution n’est pas prévu par nos textes.

C’est dans ce contexte que par une demande d’avis de conformité du Président de la République la Cour constitutionnelle est saisie sur le fondement de l’article 51 de la Constituions concernant « un projet de Constitution qu’il envisage soumettre à référendum ».

II – LE RAVALEMENT DE FAÇADE ET LE MAINTIEN DES FINALITES

L’avis émis par la Cour, à cause de son amateurisme, soulève aujourd’hui des difficultés sérieuses, tant en raison de l’ambiguïté de sa démarche juridique, que de sa connotation politique qui déclenchent, depuis quelques semaines, une montée exponentielle des troubles, suite à l’annonce officielle faite par le Président de la République sur la volonté d’aller au référendum constitutionnel.

a – Les variabilités dans la démarche de la Cour : ravalement de façade et maintien des finalités

La Cour saisie d’une demande d’avis de conformité se prononce plutôt sur la régularité de l’initiative du référendum, mais refuse d’en apprécier la conformité du contenu du Projet de Constitution qui est pourtant la raison de sa saisine.

Ce refus est la première anomalie dans la démarche de la Cour constitutionnelle.

En effet, la dissociation de l’examen de la recevabilité et de l’examen au fond présente un danger : même s’il ne porte que sur la recevabilité de l’action, l’avis rendu paraît valider l’ensemble de la procédure initiée et confère un certain crédit de conformité au Projet de Constitution.

Mais si comme elle le précise dans son 3ème considérant que, « l’article 51 … exclut une nouvelle Constitution dans son champs d’application » et donc ne peut faire l’objet d’un contrôle de conformité, en conséquence, la Cour aurait dû s’abstenir d’apprécier la régularité d’un texte dont elle ne peut contrôler la conformité.

En effet, la demande d’un avis consultatif portant sur le projet de nouvelle Constitution relève d’un contrôle préventif de constitutionnalité, parce qu’il a lieu à un moment où le projet de nouvelle Constitution en vue d’un référendum soumis à l’examen par la Cour constitutionnelle n’est pas encore été adopté et n’a donc pas encore d’effet juridique. C’est donc une absurdité d’apprécier la régularité et d’exclure le contenu du Projet de Constitution à soumettre au référendum dans les circonstances actuelles.

1) Le premier argument développé par la Cour constitutionnelle est de constater que l’article 51 comme base juridique du référendum en vue du changement de Constitution est inopérant.

Il n’est donc pas nécessaire de s’étendre sur ce premier argument, qui paraissait devoir être écarté pour deux raisons. En effet, il existe dans l’esprit de l’article 51 des conditions explicites et implicites :

– D’une part des conditions explicites fixent les actes de procédures obligatoires, (consultation du Président de l’Assemblée nationale et de la Cour constitutionnelle), que doit accomplir le Président de la République pour atteindre le but visé (le référendum).

– D’autre part des conditions implicites supposent d’abord que les institutions consultées remplissent toutes les exigences légales. Or celles-ci font défaut à l’actuelle Assemblée nationale qui est illégale. Ensuite il y a la licéité de l’objet qui est en l’occurrence le changement de Constitution qui n’est pas prévu dans notre espace normatif. Enfin dans les circonstances actuelles aucun référendum n’est constitutionnellement possible.

2) Le second argument, en revanche, doit retenir toute notre attention.

Les juges se retourneront vers, non pas des dispositions précises de la Constitution, mais plutôt vers des concepts, « l’esprit général de la Constitution et les principes généraux du droit » pour motiver la recevabilité de la demande d’avis du Président de la République.

Dans la recherche d’une solution face à une difficulté réelle, la Cour va s’abriter derrière l’imprécision, la généralité et le flou dont la portée peut facilement devenir excessive.

L’esprit général d’une Constitution coïncide à l’expression d’une volonté caractéristique traduisant les nécessités de ses réalités objectives. L’esprit général de la Constitution de 2010, car c’est bien d’elle qu’il s’agit, correspond à la nécessité d’assurer aux pouvoirs publics l’efficacité, la stabilité et la responsabilité dont il manquait sous les régimes précédents.

Cet esprit nettement marqué de l’empreinte des « Forces vives » s’est imposé en s’opposant aux dérives connues sous la deuxième République et principalement la présidence à vie connue sous le nom de « Koudéisme ».

Quant aux principes généraux du droit, ce sont des règles non-écrites de portée générale qui ne sont pas formulées dans la Constitution mais dont la violation est considérée comme une violation de la règle de droit. Cependant ils ne sont pas créés de toutes pièces par le juge mais « découverts » par celui-ci à partir de l’état du droit et de la société à un instant donné.

La motivation de la recevabilité de la Cour tombe d’elle-même dès que l’on dépasse l’effet de communication et que l’on pousse le raisonnement plus loin. En effet, la motivation des juges sur la recevabilité ne résiste pas à sa confrontation aux faits.

D’une part, parce qu’elle n’apporte aucune précision sur « l’esprit général de la Constitution » et « les principes généraux de droit » qu’elle vise. D’autre part, parce la motivation aurait dû les mettre en évidence et les interpréter en se référant aux normes existantes en corrélation avec le Projet de nouvelle Constitution.

Finalement, l’évocation de « l’esprit général de la Constitution » et de « les principes généraux de droit » contribue plus à affaiblir le raisonnement de la Cour qu’à le conforter !

b – La démarche inconsistante de la Cour : l’inadaptation de la voie de droit à la finalité visée

Il est à remarquer que dans son dernier considérant la Cour recherche une formule qui fait appel à la lecture combinée d’articles autres que celui sur lequel la demande initiale d’avis s’était fondée, à l’occurrence les articles 2 al. 1, 21 al. 1, 27 al. 1 et 45 al. 1 de la Constitution, qui n’avaient pas été visés le demandant, pour conclure qu’elle « est d’avis que le Président de la République dispose des pouvoirs constitutionnels … pour initier tout Projet de Constitution à soumettre au référendum ».

La référence aux articles 21 al.1 et 2 al.1 est inappropriée, parce qu’elle correspond à prendre l’effet pour la cause. D’ailleurs on devine aisément l’inconfort de la Cour, tant l’argumentaire est à la fois vague, sombre et volontairement touffu puisqu’il n’apporte aucun éclairage, sur leur contenu, sur leur porté et leur domaine d’application. L’efficacité du procédé est aussi perfidie que redoutable puisqu’il s’agit d’une stratégie « non formulée », consistant en des indications floues et universelles qui ne tirent leur cohérence, en l’espèce, que de leur simple affirmation.

La Cour constitutionnelle a soulevé d’office des moyens et des arguments qui lui paraissent devoir mieux motiver son avis que ceux qui sont invoqués par la demande d’avis de conformité du Président de la République en faveur du projet de nouvelle Constitution. Ce sont des règles applicables qui ne sont pas contenues dans les dispositions de la Constitution, mais peuvent également être trouvées dans son Préambule, lequel renvoie à certains instruments internationaux comme la Charte des nations unies, à la Déclaration universelle des droits de l’homme et du citoyen, la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples qui font référence à des principes généraux ayant une valeur universellement reconnue, plutôt qu’au cas spécifique de l’initiative d’un référendum ou d’un changement de Constitution dans le cadre de notre système institutionnel et normatif.

Si le Président de la République a bien un pouvoir d’initiative du référendum, mais ce pouvoir s’il est exercé dans les conditions actuelles ne peut être qualifié que d’arbitraire, parce qu’il n’est pas exercé pour poursuivre la fin indiquée par la Constitution.

La Cour a confondu l’action visant à la mise en œuvre du référendum avec le référendum en lui-même ainsi que les droits et effets qui en découlent. Le référendum est le droit du peuple mis en mouvement, c’est le droit du peuple à l’état d’action au lieu d’être à l’état de repos.

Dans l’avis émis la Cour a volontairement ou pas, confondu le droit de saisir (l’initiative du référendum et sa recevabilité) qui renvoie à un certain nombre de conditionnalités et l’exercice même de ce droit (directement par le peuple, c’est-à-dire le référendum, ou par ses représentants) la souveraineté populaire. Le référendum est un droit, un droit substantiel du peuple qui ne peut être mis en action qu’à travers un droit procédural, en l’occurrence l’article 51 qui précise la manière dont on peut faire valoir ce droit du peuple. Ainsi la Cour constitutionnelle ne peut pas se contenter de dire qu’elle « est d’avis que le Président de la République dispose des pouvoirs constitutionnels tirés des dispositions combinées des articles 2 al. 1, 21 al. 1, 27 al. 1, et 45 al. 1 pour initier tout projet de Constitution à soumettre au référendum » sans tomber dans un déni de droit. En effet le terme « tout projet de Constitution à soumettre au référendum » inclus nécessairement le référendum abrogatif qui correspond au changement de Constitution qui n’est pas prévu dans notre Constitution. La Cour dans son argumentaire devait prioritairement rechercher si l’objet que vise la demande présidentielle constitue lui-même un droit substantiel qui lui est reconnu par la Constitution.

Ainsi, le raisonnement de la Cour selon laquelle qu’en dehors de l’article 51 il existe une autre voie de droit qui peut aboutir à l’organisation d’un référendum quel qu’il soit, est inexacte.

La demande d’un référendum est une volonté, une faculté qui se distingue du référendum proprement dit qui en est la matérialisation, son accomplissement, car ladite demande ne constitue que la virtualité éventuelle d’organisation du référendum. En outre, la possibilité d’organiser le référendum ne se confond pas avec les effets découlant de son exécution, de sa réalisation effective en l’espèce au profit des objectifs visés sur le fondement du droit constitutionnel.

La Cour a pris l’effet pour la cause !

III – SILENCE, ON MASSACRE LA CONSTITUTION

a – L’avis de la cour entre communication politique et droit constitutionnel

Si la notion de peuple souverain est évoquée en appuis au pouvoir général du Président de la République par la Cour comme fondement « pour initier tout Projet de Constitution à soumettre au référendum » c’est une démarche sophiste et suspecte qui révèle une forme d’« anticonstitutionnalisme implicite » quand les juges contournent le droit pour se lancer dans une « communication politique » empreinte de populisme. En effet, si comme le soutient la Cour « le peuple détermine librement son statut politique » faut-il qu’il soit consulté, en d’autre termes faut-il que le référendum soit possible. Or la Cour reconnait que l’article 51 n’est pas opérant, il n’existe aucune autre voie constitutionnelle pour consulter directement le peuple.

Ce flirt suspect du droit et de la politique s’explique par le fait que la caution morale de la Cour constitutionnelle est un appui non négligeable parce que l’influence de ses avis est créditée d’une présomption de justesse et la plupart du temps ne saurait être analysée de manière strictement juridique.

On pourrait même pousser le raisonnement que cet avis consultatif traduit une certaine préférence politique de la Cour constitutionnelle, d’une façon de faire la politique, d’une politisation du juridique.

Le fait pour la Cour constitutionnelle de rechercher les circonstances justifiant la mise en place du projet de la nouvelle Constitution, ne constitue pas une question juridique au sens de ses attributions constitutionnelles, a pour effet de l’impliquer dans le processus politique. En conséquence, elle a accepté d’exercer des compétences non expressément prévues par la Constitution : le changement de Constitution.  Elle ne doit connaître exclusivement que des questions dans les limites de ses compétences.

Le plus grave est à venir, puisqu’une incertitude relative à l’autorité apte à initier le référendum présente bien peu d’importance, en comparaison de l’ambiguïté qui s’attache déjà au contenu de l’acte susceptible d’être l’objet d’une telle consultation, c’est-à-dire le projet de nouvelle Constitution.

b – Le Gouvernement des juges : l’ère des ambiguïtés

Par une sorte d’ingénierie de la Cour constitutionnelle dont elle seule a l’érudition, le contenu substantiel du droit est déplacé de la norme légale vers des exigences politiques.

L’avis de la Cour élargit le champ de l’initiative du référendum du Président de la République au-delà de la procédure prévue à l’article 51 de la Constitution en indiquant une autre voie de droit possible qui se fonde sur la lecture combinée des articles 2 al. 1, 21 al. 1, 27 al. 1 et 45 al. 1. Plus délicat est la justification de cet élargissement du champ de la mise en œuvre du référendum qui repose sur une interprétation vague et diffuse qui couvre des sujets touchant aux droits souverains du peuple et au mode d’élection du Président de la République.

L’argumentaire de la Cour relève de l’intoxication psychologique, d’une fabrication du consentement1, et de la manipulation avec des moyens directs ayant des visées politiques.

La Cour n’a pas fait le droit mais plutôt de la communication à travers de la désinformation qui est un simple transfert d’information qui comporte en lui-même une transformation de l’information initiale. Il s’agit de comprendre en l’espèce, que la Cour constitutionnelle a d’abord opéré une certaine forme de transfert qui nie l’information initiale (la demande de l’avis de conformité) en la dénaturant ( en portant uniquement « son appréciation sur la régularité de l’initiative de référendum constitutionnel »), ensuite en occultant la réalité à laquelle elle s’applique (le changement de Constitution) puis en regroupant de manière intempestive et non raisonnée des argumentaires bien mélangés pour les rendre incompréhensibles au plus grand nombre, enfin la Cour présente ce fatras d’« astigmatismes juridiques » (l’avis consultatif) comme information finale qui est projeté à l’écran social.

La Cour a utilisé la stratégie de l’inversion pour aboutir à la conclusion qu’elle souhaitait.

Dans sa manœuvre dérivative elle se repose sur des arguments juridiques approximatifs, ou en tout cas inadaptés au fait, créés de toutes pièces, destinés à semer des doutes dans l’esprit des guinéens et à accréditer la recevabilité et à reconnaitre des pouvoirs constitutionnels au Président de la République que la Constitution ne lui reconnait pas, « pour initier tout Projet de Constitution à soumettre au référendum ». Telle est la technique de la désinformation qui a été mise en œuvre.

On ne saurait donc forcer l’interprétation de la Constitution, dès lors qu’à l’évidence, il n’a pas été prévu, à l’origine, ni dans la lettre ni dans l’esprit qu’un référendum constitutionnel abrogatif puisse être organisé.

Ainsi la Cour constitutionnelle n’a plus d’autre utilité que de servir de garçon de course au pouvoir. Elle est désormais perçue comme un organe politique à la légitimité fragile.

Comment peut-on accepter un tel fourvoiement, même s’il s’agit de l’autorité gardienne de la constitution guinéenne, qu’elle puisse procéder à une interprétation sélective du droit, en se permettant de prendre d’une main dans les dispositions constitutionnelles qu’elle travestit de manière tendancieuse en faveur du projet de nouvelle constitution et écarter de l’autre des dispositions pourtant claires rendant impossible toute forme de référendum ? Est-ce là l’appréciation indépendante du juge constitutionnel ? Est-ce là la qualité de la neutralité intellectuelle ? Est-ce là la vertu de la grandeur morale ? Est-ce là le sacerdoce de l’objectivité de l’universitaire ?

Pour le pouvoir, cette demande d’avis était le point nodal dans son dispositif stratégique de communication indispensable pour créer un effet psychologique certain au sein de l’opinion. Et pour la circonstance la Haute Juridiction Constitutionnelle va se transmuer en nouvelle startup de communication de Sékhoutouréya.

Pour atteindre l’objectif du référendum, la Cour apprend à communiquer en instrumentalisant le droit en vue de satisfaire les attentes spécifiques du pouvoir établi.

Le rapport de force entre le droit et le politique s’est inversé. Le complexe de la « politique saisie par le droit » a cédé le pas à une revanche de la politique sur la Constitution. Avec la démarche de la Cour constitutionnelle c’est la manifestation de la vulnérabilité de la norme constitutionnelle qui apparait au grand jour. Elle traduit d’une part, désormais la vassalité de la constitution vis-à-vis du politique, d’autre part, la connivence des juges, gardiens de la Constitution avec l’exécutif.

On assiste en Guinée, si ce n’est du déclin, tout au moins de la banalisation de notre Constitution.

Nous basculons dans le gouvernement des juges ou du moins dans la souveraineté des juges qui s’érigent en constituant originaire. Ils créent le droit constitutionnel et agissent en ce que le jargon doctrinal appelle des « jurislateurs ». Autrement dit, on voit s’ériger nos juges constitutionnels en créateurs du droit, alors qu’ils ne doivent être que « la bouche de la Constitution ».

Il est compréhensible que ces juges qui n’ont qu’une très relative légitimité élective, qui n’assument qu’une responsabilité spéculative, qui jouissent d’une inamovibilité confortable et qui sont assurés d’une rente financière conséquente, le tout couronné par l’impunité totale du fait de l’absolution présidentiel dont-ils bénéficient malgré les scandales qui émaillent la gestion de cette institution, ne puissent que développer des inclinaisons caractéristiques d’un pouvoir totalitaire : ils sont à la fois le pouvoir et le contre poids de ce même pouvoir. Du reste en Guinée aujourd’hui, ce qui est en jeu, ce n’est pas que l’équilibre des pouvoirs, c’est aussi la dérive « jurislative » qui entraîne une insécurité juridique de plus en plus flagrante des principes basics de la démocratie et de la bonne gouvernance.

Il aurait été sage pour les juges, de laisser au chef de l’État la responsabilité pleine et entière du recours à ce référendum contre-nature, à plus forte raison dans des circonstances difficiles hautement politisées. En réalité, ce n’est pas à la Cour constitutionnelle, une institution de nature plus juridique que politique, d’orienter vers la prise d’une décision de cette nature.

L’influence de la position de la Cour constitutionnelle est de toute façon avérée : dans l’éventualité de l’organisation effective du référendum du changement de Constitution.

La question du changement de Constitution étant en dehors du droit, tout avis émis par la Cour la conduit à une appréciation politique. Elle s’aventure ainsi dans la « forêt interdite » qu’elle ne maitrise pas, c’est-à-dire, la sphère de l’opportunité politique. Le changement de Constitution dans le contexte guinéen ne peut relever que d’un pur fait.

En définitif, il faut se rendre à l’évidence que c’est précisément sous un angle politique qu’il s’agira de résoudre la question actuelle du changement de Constitution, et même par extension des législatives.

La vérité c’est que la recherche du fondement d’une nouvelle constitution ou d’un changement de Constitution n’est pas dans la constitution, elle lui est extérieure.

 

Dr André Camara

Juriste et politiste

1  L’expression « fabrication du consentement », utilisée pour la première fois par Walter Lippmann en 1922 dans Opinion publique. Bernays emploie le terme de propagande, in Edward Bernays, Propaganda (1928).

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